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de ce lieu affreux douze âmes de pécheurs qui y brûlaient.

Chacun sait de quelle remarquable sobriété de conteur la nature a doué Mérimée : mieux que personne, il était apte à rendre l’esprit des anciennes légendes ; pourtant je préfère la courte histoire du Bonhomme Misère au récit de Federigo. La légende française me semble supérieure au conte d’origine napolitaine, surtout par sa simplicité de composition.

C’est ce qui fait la force de la littérature populaire dans ses diverses manifestations, écrites, chantées ou improvisées.

M. Frédéric Baudry le faisait remarquer à propos des Chants du peuple que j’ai recueillis, et qu’on retrouve dans divers pays avec de nombreuses variantes.

« La poésie populaire, dit-il, possède un puissant instrument de perfection dans la transmission orale. Le papier garde tout ce qu’on y a écrit ; la mémoire du peuple est moins complaisante, elle ne conserve que ce qui lui semble bon ; le reste, elle. l’oublie ou l’altère.

« Dans ces voyages infinis de bouche en bouche, les mauvais vers sont mis de côté, les véritables formules de la pensée sont fixées ; l’expression juste finit par se frapper comme une médaille. En un mot, si je ne me trompe, la tradition doit polir les poésies à sa manière, autant et plus que le travail de cabinet[1]. »

  1. Revue de l’Instruction publique, 1861.