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plaisir ai-je dans cette vie ? quels engagemens m’y voyez-vous pour n’en pas sortir avec plaisir ? Je n’ai ni femme ni enfans (j’ai toujours eu assez d’autres maux sans cela), je n’ai pas un pouce de terre vaillant, excepté cette petite chaumière et mon poirier, qui est lui scul mon père nourricier par ces beaux fruits que vous voyez qu’il me rapporte tous les ans, et dont il est encore à présent tout chargé. Si quelque chose dans ce monde étoit capable de me faire de la peine, je n’en aurois point d’autre qu’une certaine attache que j’ai à cet arbre, depuis tant d’années qu’il me nourrit ; mais comme il faut prendre son parti avec vous, et que la réplique n’est point de saison quand vous voulez qu’on vous suive, tout ce que je désire et que je vous prie de m’accorder avant que je meure, c’est que je mange encore, en votre présence, une de mes poires ; après cela je ne vous demande plus rien.

La demande est trop raisonnable, lui dit la Mort, pour te la refuser ; va toi-même choisir la poire que tu veux manger, j’y consens.

Misère ayant passé dans sa cour, la Mort le suivant toujours de près, tourna longtemps autour de son poirier, regardant dans toutes les branches la poire qui lui plairoit le plus, et ayant jeté la vue sur une qui lui paroissoit très-belle : Voilà, dit-il, celle que je choisis ; prêtez-moi, je vous prie, votre faux pour un instant, que je l’abatte.

Cet instrument ne se prête à personne, lui ré-