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rêt ne l’avoit jamais fait agir dans aucune action de sa vie, il lui faisoit présent de tout ce qu’il lui avoit voló ; qu’il alloit le délivrer de la peine où il se trouvoit, mais à la condition qu’il falloit qu’il promît avec serment que de sa vie il ne reviendroit sur son poirier, et s’en éloigneroit toujours de cent pas aussitôt que les poires seroient mûres.

Ah ! que cent diables m’emportent, s’écria-t-il, si jamais j’en approche d’une lieuc ! C’en est assez, lui dit Misère ; descendez, voisin, vous êtes libre ; mais n’y retournez plus, s’il vous plaît. Le pauvre homme avoit tous les membres si engourdis qu’il fallut que Misère, tout cassé qu’il étoit, l’aidat à descendre avec une échelle, les autres n’ayant jamais voulu approcher de l’arbre, tant ils lui portoient de respect, craignant encore quelque nouvelle aventure.

Celle-ci néanmoins ne fut pas si secrette ; elle fit tant de bruit que chacun en raisonna à sa fantaisie. Ce qu’il y eut toujours de très-certain, c’est que jamais, depuis ce temps-là, personne n’a osé approcher du poirier du bon homme Misère, qui en a fait lui seul récolte complette.

Le pauvre homme s’estimoit bien récompensé d’avoir logé chez lui ces deux inconnus qui lui avoient procuré un si grand avantage. Il faut convenir que dans le fond il s’agissoit de bien peu de chose ; mais quand on obtient ce qu’on désire au monde cela se peut compter pour beaucoup. Misère, content de sa destinée telle qu’elle étoit, couloit sa