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L’accident qui lui étoit survenu n’étoit pas bien considérable ; mais, comme on dit, il n’est pas difficile de ruiner un pauvre homme. Dans sa cour, où l’on pouvoit entrer facilement, n’y ayant qu’unc haie à sauter, il y avoit un assez beau poirier, dont le fruit étoit excellent et qui fournissoit seul presque la moitié de la subsistance de ce bon homme. Un de ses voisins, qui avoit guetté le quart d’heure qu’il sortoit de sa maison, lui avoit enlevé toutes ses plus belles poires, si bien que cela l’avoit tellement chagriné, par la grosse perte que cela lui causoit, qu’après avoir juré contre le voleur, il s’étoit de dépit allé coucher sans souper. Sans cette aventure, il couroit encore le même risque, puisque dans toute la journée, il n’avoit pu trouver un seul morceau de pain par toute la ville.

Il avoit assurément raison d’avoir de l’inquiétude ; il y en a bien d’autres qui se chagrineroient à moins. Paul, en regardant Pierre : Voilà un homme, lui dit-il, qui me fait compassion ; il a du mérite et l’âme bien placée, tout misérable qu’il est ; il faut que nous priions le Ciel pour lui.

Hélas ! messieurs, vous me feriez bien plaisir, car pour moi, dit le bonhomme Misère, il semble que mes prières ont bien peu de crédit, puisque, quoique je les renouvelle souvent, je ne puis sortir du fâcheux état auquel vous me voyez réduit.

Le Seigneur éprouve quelquefois les justes, lui dit Pierre, en l’interrompant ; mais, mon ami, con-