Page:Histoire de l'Entente cordiale franco-anglais - Lanessan - 1916.djvu/280

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
262
L’ENTENTE CORDIALE FRANCO-ANGLAISE

chien, représenté par M. d’Ærenthal, à proposer une entente de l’Autriche, de la Russie, de la France et de l’Allemagne, dirigée contre l’Angleterre. Ærenthal était à la fois sottement anglophile et servilement germanophile. Il demandait couramment : « Qu’est-ce que l’Angleterre peut nous faire ? » et prétendait ne tenir aucun compte de l’influence anglaise. Conformément aux traditions de la diplomatie autrichienne, il estimait, non sans raison, que l’antagonisme de l’Angleterre et de la Russie servait les intérêts de la monarchie des Habsbourg en Orient et il s’efforçait de l’entretenir ou de l’accroître par tous les moyens, même les moins loyaux comme on le verra plus bas. Au printemps de 1907, d’accord avec M. de Bülow, chancelier de l’Empire germanique, Ærenthal fit au ministre des Affaires étrangères russes, M. Isvolsky, « une proposition dont les détails, dit M. Wickham Steed, n’ont jamais été divulgués, mais dont le caractère général est connu de plusieurs gouvernements européens. Cette proposition avait pour objet d’élargir l’entente austro-russe de 1897, de manière à y faire entrer l’Allemagne d’un côté, et la France de l’autre. La base de cette entente à quater devait être un système de compensations consistant probablement dans l’annexion de la Bosnie-Herzégovine par l’Autriche-Hongrie, l’ouverture des Dardanelles pour la Russie, l’aide diplomatique et financière de la France pour l’Allemagne dans l’affaire du chemin de fer de Bagdad, enfin une attitude bienveillante de l’Allemagne à l’égard de la politique française au Maroc… Le principal objet de la proposition était naturellement de rompre l’entente franco-anglaise et de mettre obstacle au rapprochement grandissant entre l’Angleterre et la Russie ou, en d’autres termes, d’empêcher la formation de la Triple-Entente que Ærenthal aussi bien que l’Allemagne considéraient comme un danger sérieux. »