ils ne puissent rien y trouver[1]. » Bon gré, mal gré, les noires durent rétrograder, plongés dans une douleur amère et mortelle ; beaucoup de pèlerins périrent de langueur ; incapables de suivre l’armée, ils s’arrêtaient et mouraient en chemin. Tous les autres revinrent à Constantinople[2].
[28.] Et nous, écoutant les discours de celui qui nous avait rapporté la révélation du Christ par les paroles de l’Apôtre[3], nous parvînmes en toute hâte à l’endroit de l’église Saint-Pierre[4] qu’il avait désigné. Treize hommes creusèrent du matin jusqu’au soir et cet homme découvrit la lance, comme il l’avait indiquée ; et on la reçut avec beaucoup de joie et de crainte, et une immense allégresse régna dans toute la ville[5].
À partir de ce moment, nous tînmes entre nous un conseil de guerre[6]. Nos chefs prirent ensuite la résolution de dépêcher un envoyé aux Turcs, ennemis du Christ, afin de les interroger d’une manière précise à l’aide d’un interprète en ces termes : « Pourquoi, dans leur orgueil, sont-ils entrés dans la terre des chrétiens et pourquoi y ont-ils établi leur camp et pourquoi font-ils périr et massacrent-ils les serviteurs du Christ ? » La délibération terminée, ils trouvèrent certains hommes, dont Pierre l’Ermite[7] et Herlouin, et leur
- ↑ D’après Anne Comnène (XI, 6, p. 120-121), Alexis, trompé par le rapport d’Étienne, aurait craint sérieusement une invasion turque en Asie Mineure et non en Bulgarie, renseignement absolument fantaisiste forgé par l’Anonyme.
- ↑ Sur la retraite de l’empereur, voir Anne Comnène, loc. cit. D’après l’Anonyme, il devait y avoir pas mal d’Occidentaux dans l’armée impériale et ce détail est confirmé par Albert d’Aix, 40, p. 417.
- ↑ Pierre Barthélemi. Cf. p. 133.
- ↑ La cathédrale d’Antioche, où était conservée la chaire de saint Pierre.
- ↑ La date du 14 juin est donnée par Tudebode, p. 73, et Raimond d’Aguilers, 11, p. 257. Cf. le récit de la lettre des princes à Urbain II (Epistulae et chartae ; lettres, p. 163) et de celle d’Anselme de Ribemont (Ibid., p. 159).
- ↑ Le conseil de guerre aurait eu lieu le jour même, 14 juin. Il y a là quelque difficulté. Voir plus loin.
- ↑ Anne Comnène (XI, 6, p. 121-122) donne du rôle joué alors par Pierre l’Ermite un récit purement romanesque. Elle ne parle pas, d’ailleurs, de son ambassade à Kerbôga, qui prouve que, malgré sa tentative de fuite, il avait gardé encore dans l’armée un certain prestige.