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ans plus tard, en septembre 1101, qu’Ekkehard a pu voir le livre à Jérusalem. Nous avons d’ailleurs la preuve que certaines parties des Gesta furent composées au fur et à mesure des événements. Blâmant la soumission des chefs aux exigences de l’empereur (chap. V), l’auteur emploie le futur : « Peut-être, dit-il, nous arrivera-t-il encore d’être déçus par nos chefs ; à la fin que feront-ils ? Ils diront, etc. » De même lorsqu’il vante le courage des Turcs à la bataille de Dorylée (chap. IX) ou lorsqu’il raconte la désertion de l’envoyé impérial Tatikios devant Antioche (chap. XVI) : « Il demeure et demeurera à jamais dans son parjure. » Il est clair que, quand cette phrase fut écrite, l’expédition n’était pas terminée.

En revanche, en d’autres endroits (chap. XIV, XV, XIX, XXI), il anticipe sur les événements. À propos de la fuite de Guillaume le Charpentier (chap. XV), il dit que, malgré le serment prêté par lui à Bohémond, il devait déserter plus tard. À l’attaque d’Antioche par Kerbôga (5 juin 1098), il raconte la capture d’un chevalier et fait allusion à sa délivrance postérieure, après la bataille du 28 juin.

Son récit n’est donc pas exactement le contenu d’un carnet de route. Certains faits lui ont été racontés après les événements. « On rapporte, dit-il, qu’Herlouin (ambassadeur des croisés à Kerbôga) connaissait les deux langues (latine et turque). » Plusieurs morceaux ont donc été rédigés quelque temps après les événements. L’étude des subdivisions, que l’on peut attribuer à la rédaction primitive, va d’ailleurs nous faire mieux connaître la méthode employée pour cette rédaction.

3. Les subdivisions de l’ouvrage. — La division actuelle en chapitres ne se trouve dans aucun manuscrit ; elle apparaît dans l’édition Bongars en 1611, mais elle est assez