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tiers de son patrimoine pour l’offrir à des histrions, lui qui donna la tunique de sa mère à une comédienne, et la lacerne de son père à un comédien : je l’excuserais encore s’il avait couvert quelque acteur tragique du manteau de pourpre rehaussé d’or de son aïeul, pour lui tenir lieu de robe traînante. On voit encore brodé sur un manteau de couleur pourpre violette d’un joueur de flûte, dont celui-ci s’enorgueillit comme d’un noble trophée, le nom de Messalla et celui de son épouse. Que dirai-je maintenant du lin tiré d’Égypte ? des étoffes de Tyr et de Sidon, si fines que l’œil pénètre leur tissu, si brillantes de pourpre, et que le travail difficile de la broderie rend plus précieuses encore ? On y donna aussi des soies tirées du pays des Atrébates, des mantelets de Canusium, et de riches tuniques d’Afrique qu’on n’avait point encore vues sur la scène.

XXI. Je consigne ici ces faits, afin d’exciter, chez ceux qui, à l’avenir, donneront des jeux, un sentiment honnête qui les empêche de dissiper pour des histrions et des bateleurs un patrimoine qui doit passer à de légitimes héritiers. Acceptez, mon cher ami, cet ouvrage : je ne le publie point, je vous l’ai souvent dit, comme un modèle d’éloquence, mais parce qu’il me semble propre à piquer la curiosité du lecteur, et que j’ai surtout à cœur d’épargner des recherches à ceux qui voudraient écrire l’histoire des empereurs en l’ornant des agréments du style : ils trouveront dans ce petit volume des matériaux qui n’attendent que leur talent. Soyez donc assez indulgent pour ne pas dédaigner mon offrande, et persuadez-vous bien que si ce livre n’est pas mieux écrit, c’est qu’il n’a pas été en mon pouvoir de mieux faire.