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pères conscrits, une lettre de l’armée très heureuse. » Lecture faite, Aurélien Tacite, qui avait droit à parler le premier (c’est lui-même qui fut à l’unanimité proclamé successeur d’Aurélien), prononça le discours suivant :

« Les dieux immortels auraient bien fait, pères conscrits, de rendre les bons princes invulnérables au fer, pour leur garantir une existence plus longue : ainsi auraient été condamnées à l’impuissance les machinations des pervers, qui méditent froidement l’assassinat ; et nous aurions encore notre empereur Aurélien, le plus capable qui fut jamais. Sous le règne de Claude, il est vrai, l’empire, ébranlé par les malheurs de Valérien et les désastres de Gallien, avait respiré un peu ; mais Aurélien, marchant de victoire en victoire, avait de nouveau soumis l’univers à nos lois. C’est lui qui nous a donné les Gaules, lui qui a délivré l’Italie, lui qui a sauvé la Vindélicie du joug des barbares. Ne sont-ce pas ses victoires qui nous ont rendu l’Illyrie tout entière, qui ont replacé les deux Thraces sous la domination romaine ? L’Orient, quelle honte pour nous ! l’Orient subissait la loi d’une femme : il l’a remis en nos mains. Les Perses, encore triomphants de la mort de Valérien, il les a mis en fuite, taillés en pièces, anéantis. Les Sarrasins, les Blemmyes, les Axomites, les Bactriens, les Tartares, les Hibères, les Albanais, les Arméniens, les tribus de l’Inde elle-même, ont tremblé devant lui, comme devant un dieu. Le Capitole est rempli des richesses dont il a dépouillé les barbares : un de nos temples possède à lui seul quinze mille livres d’or, qu’il tient de sa libéralité. Rome a vu tous les sanctuaires de ses dieux enrichis de ses dons. Eh ! n’ai-je pas raison, pères conscrits, quand j’ose accuser les dieux eux-mêmes, qui ont laissé mourir un tel prince, à moins, peut-être, qu’ils n’aient préféré l’avoir au