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laisser un chien dans Thyane », réclamaient le sac de la ville : « II est vrai, dit-il, j’ai juré que je n’y laisserais pas un chien : eh bien ! tuez-les tous. » Noble parole d’Aurélien ! Mais ce qu’il y a de plus beau encore, c’est le bon esprit des soldats : toute l’armée reçut cet arrêt, qui la privait d’un butin attendu, et sauvait une ville conquise, comme si on l’eût comblée de dépouilles. Voici la lettre au sujet d’Héraclamon :

« Aurélien Auguste à Nallius Chilon. — J’ai laissé tuer celui à qui je dois, pour ainsi dire, la prise de Thyane. C’est que jamais je n’ai pu souffrir un traître ; aussi n’ai-je point empêché les soldats de le mettre à mort. Quelle fidélité, d’ailleurs, pouvais-je attendre d’un homme qui n’a pas épargné sa patrie ? Du reste, il est le seul de tous les assiégés qui ait péri. II était riche, j’en conviens ; mais j’ai rendu tous ses biens à sa famille, afin qu’on ne pût m’accuser d’avoir fait périr un homme riche dans un but intéressé. »

XXIV. La manière dont la ville fut prise a quelque chose d’étrange. Héraclamon avait indiqué une espèce de terrasse naturelle, par où l’empereur devait, sans être aperçu, monter sur le rempart : il y monta donc ; puis, agitant sa chlamyde de pourpre, il se fit voir en même temps de l’intérieur et du dehors, aux habitants de la ville et à ses soldats. Ainsi la ville fut prise, comme si l’armée tout entière eût été sur les murailles. Ici, je ne saurais passer sous silence un fait qui concerne un homme vénérable. On dit qu’Aurélien, avait, en effet, conçu et exprimé l’intention de détruire Thyane ; mais un citoyen de cette ville, Apollonius, un sage dont le crédit et la renommée ont traversé Ies âges, un philosophe des anciens temps, le véritable ami des dieux, et qui mérite-