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VIE D’AURÉLIEN


I. On célébrait les fêtes de Cybèle, qui sont pour tout le monde, on le sait, un temps de réjouissances et de liberté. Junius Tiberianus, préfet de la ville, personnage éminent, et qu’il ne faut citer qu’avec respect, m’avait fait monter dans son char de magistrat, dans sa propre litière. Or, comme il avait quelque loisir, délivré qu’il était des soucis du forum et des affaires publiques, il se mit à causer avec moi, depuis le palais jusqu’aux jardins Valériens ; et la conversation roula particulièrement sur la biographie des empereurs. Nous arrivâmes ainsi devant le temple du Soleil, consacré par Aurélien. Junius, qui descendait de ce prince, quoiqu’à un degré assez éloigné, me demanda qui avait écrit sa vie. « Je ne l’ai jamais lue en latin, lui répondis-je, mais je l’ai quelquefois lue en grec. » Alors cet homme vénérable exhala en ces termes son affliction : « Ainsi, les Thersite, les Sinon et tant d’autres personnages, hontes de l’antiquité, nous les connaissons parfaitement, et la postérité les connaîtra comme nous ; mais le divin Aurélien : si grand comme empereur, si ferme comme général, lui qui a fait rentrer l’univers tout entier sous la puissance romaine, nos descendants ne le connaîtront pas ! Nous préservent les dieux d’une telle faute !