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UN VIEUX BOUGRE

— Y tourne à gauche, vois donc, la mère ?

— À gauche ou à d’oite… au bout c’est l’trou… et c’Gaspard-là, y peut êt’ton père, mais c’est d’bon cœur que j’paierai pou’sa messe de mort !…

— Tu dis ça rapport au p’tit… Bah ! l’père n’y pens’ra s’ment plus d’main…

— Savoir ?… On va toujours manger la soupe, pas vrai ?…

Cependant, l’ancien, fouetté de la pluie, marchait d’un pas égal et ferme. Il se parlait à voix haute. De son bâton, il rasait l’herbe de l’accotement de la route. À chaque borne heurtée, il pliait un doigt de sa main gauche. Il s’agenouilla auprès de la cinquième et, d’un vieux couteau dont il s’était servi pour d’étranges besognes et pour couper son pain, il fouilla la terre détrempée. Elle lui rendit un trésor cousu dans un chiffon de toile.

Quand il se redressa, Gaspard semblait dépasser une stature d’homme, au-dessus de l’immense plaine qui subissait les ténèbres et la pluie.