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UN VIEUX BOUGRE

son village, le banc sous les arbres, l’église au coq de fer, la plaine immense ; et il entendait le bruit rythmique des faux couchant les épis, la fuite des mulots, l’essor d’une compagnie d’alouettes levée tout à coup. L’émotion l’arrêta. Mlle Rubis songeait, accoudée, le menton dans ses paumes jointes. Elle murmura :

— Moi aussi, j’aime bien la campagne…

Ils échangèrent leur premier baiser à la gloire des champs, et ils ne connaissaient point la belle sincérité de leurs lèvres. Un joyeux groupe qui sonnait du mirliton les acclama pour la franchise de leur geste. Ils se sourirent, étonnés, satisfaits d’avoir pu, dans le vacarme et l’affluence, vivre ces minutes paisibles.

— Si ça t’fait rien… j’t’appell’rai Marie… Ton aut’nom, j’saurais pas l’dire…

— Marie, si tu veux… C’est une Marie, ta promise ?

— J’ai pas d’promise !… On a l’temps de s’mett’la corde au cou…

— Ah ! j’aime mieux ça ! soupira-t-elle.

Elle reprit :

— Alors, pourquoi qu’ça s’rait plutôt Marie ?