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rait à la guerre qu’ils louent le courage, et pourtant ils sont vaincus journellement par la débauche, par l’amour de l’argent, par toutes les passions dont leur âme est malade. Ce sont tous des Thersites de la vie. Pourquoi, Hippocrate, as-tu blâmé mon rire ? On n’en voit pas un se rire de sa propre folie, mais chacun se rit de celle d’autrui, celui-ci des ivrognes, quand il se juge sobre, celui-là des amoureux, tout affligé qu’il est d’une pire maladie ; d’autres rient des navigateurs, d’autres des agriculteurs ; car ils ne sont d’accord ni sur les arts ni sur les œuvres. Là je pris la parole : Voilà, ô Démocrite, de grandes vérités, et il n’y a point de langage plus propre à montrer la misère des mortels ; mais agir est imposé par la nécessité, à cause de la gestion des affaires domestiques, à cause de la construction des navires, à cause de tout ce qui concerne l’État, opérations auxquelles il faut que l’homme soit employé ; car la nature ne l’a pas engendré pour ne rien faire. Avec ces prémisses, l’ambition si générale a mené à faux l’âme droite de beaucoup, qui s’occupaient de toute chose comme devant réussir, et qui n’avaient pas la force de prévoir ce qui était caché. Qui donc, ô Démocrite, en se mariant, a songé à la séparation ou à la mort ? en ayant des enfants, à les perdre ? Il n’en est pas autrement pour l’agriculture, la navigation, la royauté, le commandement et tout ce qui se trouve dans le