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biens et les maux ; mais, au vrai, je ne ris que d’un seul objet, l’homme plein de déraison, vide d’œuvres droites, puéril en tous ses desseins, et souffrant, sans aucune utilité, d’immenses labeurs, allant, au gré d’insatiables désirs, jusqu’aux limites de la terre et en ses abîmes infinis, fondant l’argent et l’or, ne cessant jamais d’en acquérir, et toujours troublé pour en avoir plus, afin de ne pas déchoir. Et il n’a pas honte de se dire# heureux, parce qu’il creuse les profondeurs de la terre par les mains d’hommes enchaînés, dont les uns périssent sous les éboulements de terrains trop meubles, et les autres, soumis pendant des années à cette nécessité, demeurent dans le châtiment comme dans une patrie. On cherche l’argent et l’or, on scrute les traces de poussière et les raclures, on amasse un sable d’un côté, un autre sable d’un autre côté, on ouvre les veines de la terre, on brise les mottes pour s’enrichir, on (ait de la terre notre mère une terre ennemie, et, elle qui est toujours la même, on l’admire et on la foule aux pieds. Quel rire en voyant ces amoureux de la terre cachée et pleine de labeur outrager la terre qui est sous nos yeux ! Les uns achètent des chiens, les autres des chevaux ; circonscrivant une vaste région, ils la nomment leur, et, voulant être maîtres de grands domaines, ils ne peuvent l’être d’eux-mêmes ; ils se hâtent d’épouser des femmes que bientôt après ils répudient ; ils aiment, puis haïssent ; ils veulent des enfants, puis, adultes, ils les chassent.