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même ; il était près de moi, et nous touchions déjà aux portes d’Abdère. Esculape se montrait, non comme le représentent d’ordinaire les images, doux et tranquille, mais animé en sa démarche et d’un air qui ne laissait pas d’inspirer la crainte ; il était suivi de dragons, sorte de reptiles énormes, se hâtant, eux aussi, dans leurs longs replis, et faisant entendre, comme dans les déserts et les creux vallons, un sifflement formidable ; ses compagnons, tenant des boîtes de médicaments bien closes, venaient derrière. Le dieu me tendit la main ; et moi, la saisissant avec ardeur, je le priai de se joindre à moi et de ne pas m’abandonner dans le traitement. Mais lui : « Tu n’as pas besoin de moi, dit-il, en cette occurrence ; mais, présentement, celle-ci, déesse commune des immortels et des mortels, te conduira. » Et moi, me retournant, j’aperçois une femme belle et grande, coiffée simplement, magnifiquement vêtue ; le globe de ses yeux rayonnait d’une pure lumière, de sorte qu’on aurait dit des étoiles. Le dieu s’éloigna, et cette femme, me serrant la main avec une certaine force sans violence, me conduisit par la ville avec complaisance. Lorsque nous fûmes près de la maison où je pensais que l’hospitalité m’était préparée, elle s’en alla comme une vision, disant seulement : « Demain, je te retrouverai chez Démocrite. » Déjà elle se retournait, lorsque je lui dis : « Je te prie, noble dame, qui es-tu et quel est ton nom ? — La Vérité, dit-elle ; et celle que tu vois s’approcher (tout-à-coup en effet une autre m’apparut, non dépourvue non plus de beauté, mais d’un air et d’une démarche plus hardie) se nomme l’Opinion, et elle habite chez