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l’intolérable cupidité d’argent comme par un souffle d’orage. Et plût au ciel que tous les médecins se réunissent pour guérir cette maladie plus fâcheuse que la folie ! Car on tient à bonheur ce qui est maladie et fait tant de mal. Pour moi, je regarde toutes les maladies de l’âme comme des folies intenses qui créent dans la raison certaines opinions et fantaisies dont on guérit purgé par la vertu. Si je voulais m’enrichir par tout moyen, je n’irais pas auprès de vous, ô Abdéritains, pour dix talents, mais je me rendrais auprès du grand roi des Perses, chez qui des villes entières remplies de toute l’opulence humaine deviendraient mon partage ; je guérirais la peste qui y règne. Mais j’ai refusé de délivrer d’une maladie mauvaise un pays ennemi de la Grèce, portant, moi aussi, pour ma part, un coup à la puissance navale des barbares. La richesse du roi et cette opulence ennemie de ma patrie me seraient un opprobre, et je ne les posséderais qu’à titre de machine de guerre menaçant les villes de Grèce. Richesse n’est pas gagner de l’argent de tout côté ; et grandes sont les saintetés de la vertu, que la justice ne cache pas, mais dévoile. Ne pensez-vous pas que c’est une égale faute de sauver des ennemis et de guérir des amis pour de l’argent ? Telle n’est pas notre conduite, ô peuple d’Abdère ; je ne tire pas parti des maladies, et je ne me suis pas félicité en apprenant que Démocrite délire, lui qui, s’il est sain d’esprit, de-