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qui consiste en purifications et en incantations. Veut-on la supposer divine à cause du merveilleux qu'elle présente? mais alors il y aura beaucoup de maladies sacrées et non une seule; car je montrerai que d'autres maladies, que personne ne considère comme sacrées, ne sont ni moins merveilleuses ni moins effrayantes. En effet, d'un côté, les fièvres quotidiennes, tierces et quartes ne me paraissent aucunement moins sacrées ni moins dues à la divinité que cette maladie, et cependant personne ne s'en émerveille; d'un autre côté, je vois des hommes saisis de transport et de délire sans aucune cause manifeste faire une foule d'actes insensés; j'en vois beaucoup qui dans le sommeil poussent des gémissements et des cris, qui sont suffoqués, qui s'élancent, fuient au dehors et délirent jusqu'à ce qu'ils soient réveillés ; puis les voilà sains et raisonnables comme auparavant, restant néanmoins pâles et faibles, et cela, non pas une fois, mais plusieurs. Je pourrais citer encore des cas de ce genre nombreux et variés; mais ce serait trop allonger le discours que d'entrer, pour chacun, dans le détail. Ceux qui, les premiers, ont sanctifié cette maladie, furent à mon avis ce que sont aujourd'hui les mages, les expiateurs, les charlatans, les imposteurs, tous gens qui prennent des semblants de piété et de science supérieure. Jetant donc la divinité comme un manteau et un prétexte qui abritassent leur impuissance à procurer chose qui fût utile, ces gens, afin que leur ignorance ne devînt pas manifeste, prétendirent que cette maladie était sacrée. A l'aide de raisonnements appropriés, ils arrangèrent un traitement où tout était sûr pour eux, prescrivant des expiations et des incantations, défendant les bains et