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épidémies, livre iii.

les bubons dans les lieux ordinaires, c’est-à-dire aux aines et aux aisselles, la forme épidémique de la maladie, la contrée où elle régnait (Égypte et Lybie), tout cela prouve sans réplique qu’il s’agit véritablement de la peste orientale, de la peste à bubons. Ainsi il demeure établi contre l’opinion de ceux qui admettent que l’apparition de la peste date du sixième siècle de l’ère chrétienne, qu’elle a régné dès le premier siècle au moins ; et contre l’opinion de ceux qui regardent l’Égypte comme exempte de ce fléau dans l’antiquité, que ce pays en a été affligé dès lors comme de notre temps. Que si l’on objecte le silence qu’ont gardé les historiens sur ces épidémies, il faudra répondre qu’il nous reste bien peu de la littérature antique, et que c’est un fragment de Rufus, citant Posidonius et Dioscoride, qui nous a appris l’existence de la peste en Égypte et dans le premier siècle.

Tant que l’on regardait la peste comme étrangère à l’Europe avant le temps qui a précédé la chute de l’empire romain, il était superflu de chercher, dans les livres hippocratiques, des traces de cette affection ; mais, du moment qu’il est établi qu’elle a régné dans l’antiquité, on est autorisé à examiner jusqu’à quel point certaines indications, peu précises il est vrai, peuvent y être rapportées. Je ne connais dans les livres hippocratiques que deux passages auxquels un examen de ce genre soit applicable.

Le premier se trouve dans les Aphorismes ; on y lit : « Les fièvres dans les bubons sont toutes fâcheuses, excepté les fièvres éphémères[1]. » Cette proposition renferme implicitement que, dans des cas de bubons, des fièvres avaient été observées et que ces fièvres étaient toutes de mauvais caractère quand elles n’étaient pas éphémères. Quelles peuvent être, avec des bubons, ces fièvres graves ? J’ai rappelé, t. 2, p. 585, quelques exemples, très peu communs il est vrai, de bubons dans des cas de fièvres malignes qui n’étaient pas la

  1. Οἱ ἐπὶ βουβῶσι πυρετοὶ, πάντες κακοί, πλῆν τῶν ἐφημέρων. 4, 54.