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travaux modernes sur les livres hippocratiques.

c’est qu’il a essayé d’en juger la légitimité par la nature des notions anatomiques qui y sont consignées. Il regarde l’anatomie d’Hippocrate comme très peu avancée ; il est disposé à rejeter comme illégitime tout écrit où les connaissances de ce genre ont quelque étendue. Cependant il n’articule que peu de faits spéciaux, entr’autres la connaissance des muscles et la distinction des artères et des veines, double notion qu’il croit postérieure à Hippocrate. J’examinerai ailleurs la vérité de ces assertions.

Son intention a été de s’appuyer sur les témoignages des auteurs anciens, et il nomme aussi les premiers commentateurs des écrits hippocratiques, mais, dans le fait, il se borne presque uniquement à Palladius, Érotien et Galien ; et il faut bien, qu’en réalité, le point de vue de sa critique ne soit pas sorti de ce cercle, puisqu’il dit : « La bibliothèque d’Alexandrie ayant été brûlée par les soldats de Jules-César, n’a-t-il pas été facile à des hommes mal-intentionnés de substituer des livres apocryphes aux véritables, détruits par l'incendie[1] ? » Gruner a oublié dans ces lignes que des commentaires, antérieurs de deux cents ans à l’incendie de la bibliothèque alexandrine, témoignent que la Collection hippocratique existait dès cette époque telle qu’Érotien et Galien la connurent plus tard.

Gruner regrette à ce sujet la perte des traductions latines d’Hippocrate dont Cassiodore a parlé ; comme si le témoignage d’Héraclide de Tarente, de Glaucias et de Bacchius n’était pas préférable à tout autre, puisqu’ils ont vécu environ quatre cents ans avant Galien, et six cents avant Cassiodore. Au reste, Gruner a emprunté cette grave erreur à Mercuriali, qui dit, dans son Examen, p. 3 de l’édition qu’il a donnée

  1. Censura librorum Hippocrateorum, Vratislaviæ, 1772, p. 5.