Page:Hetzel - Verne - Magasin d’Éducation et de Récréation, 1903, tomes 17 et 18.djvu/729

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ainsi, s’écria M. Harrison, d’un ton sévère.

— Suzanne m’a mise au lit, mais je me suis échappée. Il le fallait : Jock m’a permis de vous dire où il était allé s’il n’était pas de retour dans deux heures. Il est parti depuis un temps bien plus long, aussi ne perdez pas une minute ; partez le chercher à l’instant, s’écria Molly dans une précipitation que causait son émotion.

— Jock !… fit le grand-père commençant à s’inquiéter. Ma chère enfant, rêves-tu encore ? Ton ami est chez lui, bien loin de nous !

— Non, Jock est ici. Il est arrivé un peu après votre départ ; il a été désolé de ne pas vous rencontrer, car il avait un impérieux besoin de vous parler. Tramp et lui ont fait la route à pied depuis Drisley, parce qu’ils n’avaient pas d’argent pour payer leur place dans le train.

— Quelle raison l’amène ici ? Ne pouvait-il pas m’écrire au lieu de se mettre en route ? s’écria M. Harrison avec stupéfaction. Mais où est-il ?

— Il est venu vous dire de ne pas vendre Beggarmoor. Il ne faut pas vous fâcher contre lui, car vous lui avez recommandé de recourir à vous, en cas de besoin. Il est monté là-haut, tout seul, il y a longtemps. Oh ! grand-père ! allez le chercher ! Je suis sûre que ce méchant homme l’a blessé ; sans cela il serait déjà revenu. Et les larmes de Molly coulaient avec abondance.

— Monté jusqu’à Beggarmoor, tout seul, à pareille heure, la nuit ! s’écria M. Harrison. Et encore après avoir marché depuis Drisley ! mais l’enfant en mourra ! Aide-moi à remettre mon pardessus, Molly, il faut que j’aille à sa recherche… Mais, qu’est-ce que cela ? » ajouta-t-il en apercevant une dépêche sur la table.

Il l’ouvrit et lut à haute voix : « Avez-vous nouvelles de Jock ? Parti depuis hier matin. Réponse télégraphique, ici. »

Puis, suivaient le nom de Mme Pole et son adresse à Londres.

« Vous pourrez répondre demain matin ; le plus pressé est de retrouver Jock, déclara Molly.

— À bientôt, ma chérie. Pauvre mère ! Combien elle doit être inquiète ! Je suppose qu’elle a suivi le fugitif jusqu’à Londres. Avant de répondre, il me faut savoir ce qui est arrivé à ce jeune garnement », et M. Harrison, saisissant son chapeau, se préparait à sortir.

Soudain, la porte s’ouvrit et Jock parut.

L’enfant avait les vêtements couverts de boue, les mains en sang, les yeux hagards, la figure bouleversée. Il portait le corps inanimé de Tramp, dont les longues pattes pendaient inertes.

« Je l’ai ! s’écria Jock, le papier du trésor caché de Beggarmoor. Dites-moi si je n’avais pas raison de le poursuivre ! » Il tendit le papier à M. Harrison ; puis, se tournant vers Molly, il lui posa Tramp dans les bras.