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s’ébranla dans un nuage de poussière, tandis que Riquet, la main dans celle de Jean, restait sur la route, les yeux humides, la lèvre boudeuse…

« Monsieur Henri, dit alors le vieux cocher, je vais manger un morceau sur le pouce et boire un coup avec les autres ! Serez-vous bien sur ce banc à l’ombre pour m’attendre ? »

L’enfant répondit un oui maussade de la tête ; il ne décolérait pas !…

Jean, habitué aux façons hargneuses de son jeune maître, ne s’en préoccupa point et s’attabla avec les camarades, à l’intérieur de la maisonnette rustique.

Bientôt, il fut lancé dans le récit de son entrée à Milan, pendant la campagne d’Italie… Il frappait de grands coups de poing sur la table pour souligner les passages intéressants…

(La suite prochainement.) J. de Coulomb.

JOCK ET SES AMIS
Par A. DECKER, d’après E. HOHLER

IX (Suite.)
Un étrange voyage.

Puis le jeune maître et son chien repartirent, reposés et restaurés. Tramp était vraiment content ; il essayait de l’exprimer par le frétillement de sa queue ; et, de fait, une journée en plein air valait mieux que de longues heures sous un hangar sombre.

Quand ils arrivèrent à l’autre garé, les perplexités de Jock se renouvelèrent. Instruit par l’expérience, il s’enquit timidement du prix d’un billet de troisième classe jusqu’à sa destination. « Douze shillings et six pence », répondit l’employé, en jetant au petit garçon un regard étonné ; l’enfant ne semblait pas de ces gens qui voyagent seuls, si loin, et en troisième classe.

« Combien le billet pour mon chien ? demanda Jock anxieusement.

— Deux shillings, ce qui fera en tout quatorze shillings et six pence. »

Jock, par un rapide calcul, s’aperçut qu’il lui manquait deux shillings six pence ; sa figure marqua la consternation et il sembla succomber au désespoir.

« Qu’est-ce donc ? Vous n’avez pas d’argent ? » dit l’employé, remarquant son hésitation.

Le petit garçon secoua la tête en se demandant quel serait le meilleur moyen pour sortir de difficulté.

— Il ne me reste que douze shillings. Pouvez-vous me dire jusqu’où je puis aller avec mon chien ? »

L’employé avait du loisir ; il éprouvait un si vif intérêt pour ces étranges voyageurs, qu’il s’évertua à les aider. Grâce à l’indicateur, il déclara que pour cette somme ils pourraient aller jusqu’à Drisley. Là, ils seraient à environ vingt-cinq milles de leur destination.

« S’il vous plaît, donnez-moi un billet jusqu’à Drisley ; nous ferons à pied le reste du chemin », dit Jock, qui sentait son courage renaître, maintenant que sa résolution était prise.

Les wagons de troisième classe étaient encombrés. Jock dut se tenir presque debout dans son coin, Tramp dans les bras, les pieds appuyés sur les paquets d’une grosse femme assise près de lui. Vaincu par la fatigue, il s’endormit néanmoins et ne se réveilla qu’à la descente de la plupart de ses compagnons de route.

Il faisait presque nuit ; Jock s’assit enfin en face de la grosse femme, qui avait tiré de son sac des babas secs qu’elle dévorait avec appé-