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fous, lui et Tramp dévalèrent la dernière pente et arrivèrent haletants au guichet.

« Un billet pour Londres, s’il vous plaît, dit Jock en présentant à l’employé, et non sans orgueil, son souverain d’or.

— Première classe, je pense, monsieur ? demanda l’homme en le regardant.

— Oui, s’il vous plaît », reprit Jock, se souvenant de son voyage avec M. Harrison.

Il comprit son imprudence quand il lui fallut débourser sept shillings, le tiers de sa fortune. C’était largement entamer ses maigres ressources dès le début du voyage. Jock n’osa pas demander s’il pouvait échanger son billet contre le prix d’une classe inférieure ; il paya et se disposait à partir quand remployé l’arrêta :

« Vous ne prenez pas un billet pour votre chien, monsieur ? »

Le visage de Jock s’assombrit.

« Ah ! j’oubliais, dit-il, qu’il fallût un billet pour le chien.

— Vous ne pouvez pas l’emmener sans cela, et, si vous ne vous dépêchez pas, le train va partir sans vous. C’est un shilling. »

Au dehors retentit un avertissement : la machine sifflait. Jetant l’argent, Jock saisit le billet et se précipita sur le quai ; il eut le temps de grimper dans un wagon : le train se mettait en marche.

« Je ne me figurais pas que ce fût si cher, dit-il, en s’adressant à Tramp, lorsqu’ils furent assis l’un en face de l’autre. J’espère que nous aurons assez d’argent pour aller jusqu’à Gray-Tors, mais nous ne pourrons pas faire la dépense d’une voiture à Londres. Il nous faudra traverser la ville à pied, car je me rappelle avoir vu M. Harrison donner au cocher une demi-couronne et je crains bien de n’être pas à même de t’offrir un bon dîner. Peu importe, mon vieux. Certainement Molly te servira une soupe délicieuse, ce soir, quand nous arriverons. »

Tramp dressa les oreilles, remua la queue ; il semblait écouter, et, pendant quelque temps, son maître trompa l’ennui du voyage en lui parlant.

Cependant ils approchaient de Londres. Jock commençait à se sentir las ; il avait faim. La longue marche, le départ matinal sans déjeuner convenable l’avaient fatigué.

En se voyant seul avec son chien sur le quai de la ville tumultueuse, il éprouva une réelle détresse. Il fut quelque temps à reprendre courage pour s’informer dans quelle direction se trouvait l’autre gare.