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ses excitations, de ses conseils et de son bras infatigable il soutint ses quatre neveux, qui furent successivement les chefs religieux des Oulad Sidi Cheikb Cheraga : Et Si Slimane, qui commença la révolte puis succomba peu après, à l’affaire Beauprêtre ; et Si Mohammed, qui tomba l’année suivante à Garet Sidi Cheikh ; ensuite Si Ahmed, qui, battu à Kbeneg Souez, comme nous venons de le voir, laissa son oncle supporter seul le poids des journées de Chellala, mais prit sa revanche dans la suite, et mourut deux ans plus tard au Maroc ; enfin Si Kaddour, dont nous avons vu ailleurs le rôle brillant. Mais, dominant les neveux, se lève la figure de l’oncle, du rebelle irréductible, qui, le premier dressé contre nous, resta debout le dernier. Sa soumission complète précéda de bien peu sa mort (1895).

« N’oublions pas, à côté de ceux-là, une personnalité moindre, ce Bou Amama qui manqua non de l’audace mais de l’influence seulement, toutes deux nécessaires cependant chez les indigènes pour faire de grandes choses.

« Tous ont été vaincus par nous, mais ce ne fut pas sans des difficultés innombrables et des pertes sérieuses.

Ce sont eux qui ont semé ; ce sont les Ed Dine, les Hamza et les Larbi qui récoltent. Espérons, — pour eux, — que l’envie de semer à leur tour ne les prendra jamais. »

Ainsi termina M. Naimon, tandis que nous retournions au Ksar après une visite au tombeau du père de Sidi Cheikh.

(La suite prochainement.) Michel Antar.

LE GÉANT DE L’AZUR
Par ANDRÉ LAURIE

XV

L’ « Épiornis no 3 » .


Vingt jours de labeur incessant avaient peu à peu fait prendre tournure à l’Épiornis no 3, composé hybride du géant des âges disparus et de l’oiseau mécanique de Passy.

Par une intuition digne d’un Cuvier, il se trouvait que M. Wéber, en établissant le plan de son aviateur, d’après les seules données du crâne d’épiornis exposé au Jardin des Plantes, auprès du fameux squelette de la baleine normande, avait suivi de très près les dimensions normales de l’oiseau préhistorique. De ce crâne, il avait logiquement déduit les proportions de la cage thoracique, celles de l’aile, celles de l’épine dorsale. Il s’ensuivait que les pièces détruites ou hors d’usage, parmi les débris de son œuvre, pouvaient être suppléées par les parties analogues du squelette naturel, comme Gérard l’avait prévu du premier coup d’œil.

Ainsi de l’omoplate droite, ainsi de telle ou telle partie de l’aile, de telle ou telle côte, de telle vertèbre par trop endommagées.

Ce que l’industrie seule d’une usine spéciale aurait pu refaire en pays civilisé, la bonne nature le fournissait tout prêt en cette île maudite et primitive.

Quant aux moyens d’assemblage et de revêtement, les provisions de caoutchouc en feuilles et de colle forte emmagasinées dans les soutes de l’aviateur y suffisaient largement. Même, il advint que le manchon naturel de l’articulation de l’épaule fossile, assouplie par un bain prolongé d’huile de marsouin bouillante, put servir tel quel. À peine fut-il nécessaire de réduire à la lime quelques reliefs trop marqués ou d’un poids excessif. Le crâne artificiel fit place au crâne naturel, par coquetterie pure du constructeur, car il était intact.

L’hélice caudale, redressée au marteau, n’avait plus l’élégance de l’état de neuf, néan-