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vous veux faire du bien. » (Il tire quelques pièces d’or de son escarcelle et les lui donne.) Prenez ceci, en attendant mieux.

Jacqueline, faisant force révérences. — Ô monseigneur ! monseigneur !

Gruthuse. — Eh bien, Jacqueline, direz-vous encore que les fils valent moins que les pères ?

Jacqueline, exaltée. — Ils valent mieux ! ils valent mieux !

Charles. — Non, ma bonne, mais peut-être autant, (à Gruthuse) Il me semble qu’il ne pleut plus ?

Gruthuse. — Non, monseigneur, et on entend les cors de chasse. (Ils reprennent les manteaux.)

Charles. — Allons ! (à Jacqueline.) Adieu, mère Jacqueline.

Jacqueline. — Adieu, monseigneur, et bien des merci pour votre grande bonté. Mais… croyez-en une vieille femme : ne faites pas la guerre.

Gruthuse, finement. — Comment trouvez-vous le conseil, monseigneur ?

Charles, riant. — Fort bon. Ah ! ah ! ah ! ah ! (Il sort avec Gruthuse.)

Jacqueline, hochant la tête. — Oui, que le conseil est bon. Mais, hélas ! pauvre prince ! il ne le suivra pas. Je vais prier pour lui.

Berthe Vadier.
JOCK ET SES AMIS
Par A. DECKER, d’après E. HOHLER

IV

Beggarmoor[1].


« J’ai à faire une course en voiture, cet après-midi, Jock, tu peux venir avec moi si cela te plaît, dit un matin M. Grimshaw ; il va de soi que Tramp est compris dans l’invitation », ajouta-t-il en souriant.

Il y avait environ une semaine que Jock était à Gray-Tors, mais, à part ses excursions sur la lande, près de la maison, il n’avait rien vu du pays environnant, car jusqu’à ce jour son oncle n’avait pas été assez bien pour sortir. Aussi ce fut avec joie qu’il accepta la proposition.

« Je descends en ville voir ton ami M. Harrison, dit le vieux monsieur, comme ils montaient en voiture ; mais d’abord nous nous arrêterons chez un de mes fermiers qui demeure dans la partie la plus stérile de ces landes. Tu pourras ainsi te convaincre combien est triste et sauvage une habitation du Derbyshire.

— Vivre seul, là, ne me déplairait pas ; on est si libre et si près des nuages, répliqua Jock, en regardant les pentes couvertes de bruyères qui s’étendaient de tous côtés. C’est une ferme que nous allons visiter, n’est-ce pas ?

— C’est à peine si cette habitation peut être désignée ainsi. On l’appelle Beggarmoor et son nom la définit exactement ; c’est une campagne nue, stérile, dont personne n’a jamais su tirer parti.

— Et sont-ils très pauvres, les gens qui vivent là ? demanda Jock.

— Un seul homme habite ce lieu désolé. Il doit être assez misérable, car il me paye rarement son loyer ; je crois cependant qu’il met peu de bonne volonté à s’acquitter. Du même côté, j’ai des ouvriers occupés au percement d’un puits artésien ; ce travail t’intéressera, j’en suis sûr.

— J’ai entendu parler de puits de ce genre, mais je n’en ai jamais vu. Ils sont, je crois, très profonds et n’ont pas une large ouverture comme les puits ordinaires.

— Au lieu de creuser, on enfonce un tuyau

  1. Pauvre lande.