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BOURSES DE VOYAGE

la culture du coton et de la canne à sucre. Après le retour du bâtiment à Londres, la concession de la Barbade fut accordée au comte de Marlborough et, affaire conclue avec un riche négociant de la Cité ; des planteurs vinrent s’installer sur l’île en 1626. Ce sont eux qui construisirent la première ville, à laquelle ils donnèrent le nom de James-Town, en l’honneur de leur souverain.

Avant cette époque, il est vrai, le comte Carlisle avait obtenu la concession de toutes les Caraïbes, et il se crut fondé à réclamer la Barbade.

De là naquit entre les deux lords une lutte qui se prolongea, non sans une extrême vivacité, et amena en 1629 la reconnaissance des droits du comte Carlisle par Charles Ier d’Angleterre.

Pendant la période des troubles religieux de la Grande-Bretagne, le nombre fut considérable de ceux qui voulurent les fuir, et la Barbade profita dans une large mesure de cette émigration dont s’accrurent l’importance et la prospérité de la colonie.

Après le dictatoriat de Cromwell, lorsque la restauration eut rendu à Charles II le trône de son père, ce roi fut prié par les colons d’accepter la souveraineté de l’île en promettant de payer à la Couronne un impôt de quatre et demi pour cent qui frapperait tous les produits de l’île. L’offre était trop avantageuse pour être repoussée. Aussi, le 12 décembre 1667, fut signé le traité d’annexion de la Barbade au domaine colonial de la Grande-Bretagne.

La prospérité de l’île ne cessa de s’accroître depuis cette époque.

Dés l’année 1676, sa population montait à cent vingt mille habitants, pour diminuer quelque peu ensuite ; les blancs ne comptant que pour un cinquième par rapport aux affranchis et aux esclaves, conséquence de l’avidité des gouverneurs. Toutefois, par sa position même, la Barbade ne fut point troublée par les interminables luttes de l’Angleterre et de la France, et d’ailleurs elle se trouvait protégée par ses défenses naturelles.

Ainsi, alors que la plupart des autres Antilles ont successivement passé sous des dominations diverses, la Barbade, devenue anglaise dès les premiers temps de sa découverte, l’est toujours restée de langage et de mœurs.

Au surplus, parce qu’elle relève de la Couronne, il ne faudrait pas croire qu’elle ne jouit point d’une certaine indépendance. Sa maison d’Assemblée compte vingt-quatre membres nommés par cinq mille électeurs censitaires. Si elle est soumise à l’autorité d’un gouverneur, d’un conseil législatif, et de neuf membres désignés par le souverain, elle est administrée par un conseil exécutif où figurent, avec les principaux fonctionnaires, un membre de la Chambre haute et quatre membres de la Chambre basse. Divisée en onze paroisses, l’île dispose d’un budget dont le total n’est pas inférieur à seize cent mille livres[1].

C’est le gouvernement de la Barbade qui commande toutes les forces navales dans les petites Antilles anglaises. Bien que l’île n’occupe que le cinquième rang avec une étendue de quatre cent trente kilomètres superficiels, elle est au deuxième rang par le chiffre de sa population, et au troisième par l’importance de ses affaires commerciales. Sa population s’élève au chiffre le plus considérable de tout l’archipel, soit cent quatre-vingt-trois mille habitants, dont le tiers occupe Bridgetown et ses faubourgs.

La traversée entre le port de Castries de Sainte-Lucie et Bridgetown de la Barbade exigea près de quarante-huit heures. Avec une brise bien établie, une mer maniable, l’Alert eût franchi cette distance en moitié moins de temps ; mais il se produisit des intermittences et des changements de vent qui ne permirent pas de suivre la route directe. La brise tendit même à haler le nord-ouest, ce qui obligea

  1. 40 millions de francs.