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Cet honneur, El Hadj Kaddour Sahraouï[1] l’a, depuis lors, invoqué pour lui-même. Les dépositions à peu près certaines de témoins véridiques du combat l’attribuent à un simple cavalier des Harrar. C’est bien dommage… pour le récit.

Six années passèrent. L’insurrection ne s’était pas terminée par la mort de Si Mohammed. Si Ahmed d’abord, puis, en 1807, Si Kaddour en prirent la direction.

À la suite d’une série d’échecs, ce dernier, diminué, vaincu, mais non lassé, cessa momentanément la lutte, pour réparer ses forces. Cette accalmie, qui coïncida heureusement avec notre guerre contre l’Allemagne, prit fin au mois d’avril 1871. Alors, se croyant assez fort, le marabout reprit la campagne. Et nous le retrouvons, après des péripéties diverses, campé, au commencement de décembre, à El Kheroua. Pourchassé par le colonel Gand jusqu’à El Mengoub, un groupe de puits à une vingtaine de kilomètres au sud de Benoud, il accepte le combat, qui tourne rapidement pour lui en déroute. C’est à peine si, blessé assez grièvement, il parvient à se sauver avec son oncle Si Lala, également blessé. Il abandonne entre les mains de nos goums un butin considérable, parmi lequel deux étendards, et même son propre cachet. Douze cents tentes qui avaient suivi sa fortune furent reprises. En outre, on s’empara de sa smala, où se trouvaient encore une de ses femmes ainsi que ses deux fils Mohammed et Hamza[2].

Ce fut le dernier coup porté à la grande insurrection. Mais les négociations entamées avec ses chefs ne devaient aboutir qu’en 1883, après l’agitation causée par Bou Amama.

25 novembre. — Ayant donné l’ordre à notre convoi de marcher sans se presser, pour ne revenir à El Abiod que le jour suivant, nous nous séparâmes de la compagnie montée qui devait repartir seulement le 26 dans la direction de Bou Semghoun. Le long du versant oriental du Tismert, nous fîmes, suivis seulement de Congo, une marche rapide dont je n’ai gardé aucun souvenir particulier. Et le soir même, à El Abiod, nous retrouvions notre ami Slimane qui nous montrait, dans un sourire de bienvenue, son admirable rangée de dents blanches.

(La suite prochainement.) Michel Antar.

LE GÉANT DE L’AZUR
Par ANDRÉ LAURIE

VIII (Suite.) — Vers le pôle austral.

Après quoi, la mer s’apaisant de plus en plus et le passage monotone des icebergs cessant d’offrir l’intérêt que leur avait d’abord prêté la nouveauté, chacun alla se coucher, sauf les hommes de quart, car personne n’avait guère dormi pendant l’ouragan et tout le monde tombait de sommeil.

Gérard croyait avoir à peine fermé les yeux — en réalité, il avait dormi plusieurs heures — lorsqu’il fut réveillé en sursaut par un choc effroyable.

S’étant couché tout habillé, il fut sur pied en un clin d’œil et monta vers la passerelle, en même temps que son frère, M. Wéber, le commandant Marston et les hommes logés à l’avant, que la violence de la collision avait

  1. El Hadj Kaddour Sahraouï était destiné à mal finir. Pendant l’insurrection de 1881, il trouve moyen de nous trahir encore une fois, avec ses goums, au combat de Tazina. Arrêté en 1883, puis révoqué, il est mort pendant l’internement auquel il fut condamné.
  2. Mohammed fut placé dans la suite au lycée d’Alger. Revenu en 1884, il est mort à Timendert en 1886. C’est lui qui marcha quelque temps avec Marcel Palat, au Touat. Hamza est aujourd’hui caïd des Oulad si el hadj Bou Hafs.