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« L’affaire Bacri, plus que tout le reste, tenait au cœur du dey. Bacri et Busnach, deux juifs algériens, avaient fait au Directoire d’importantes fournitures de blé qui n’avaient pas été payées intégralement ; l’Empire donna quelques acomptes ; en 1819, la créance fut réglée à sept millions, mais la convention, alors conclue, réserva expressément les droits des Français dont Busnach et Bacri étaient les débiteurs ; des oppositions se produisirent et une partie de la somme fut retenue en attendant la décision des tribunaux. Hussein, qui avait de gros intérêts dans l’affaire et qui n’entendait rien aux formes compliquées de la justice française, s’indignait de ces lenteurs. Il se croyait victime d’une intrigue ourdie contre lui par le consul Deval. Il s’adressa directement au gouvernement du roi, réclama les deux millions et demi qui lui étaient dus, ajoutant que les ayants-droit n’auraient qu’à se présenter ensuite devant son tribunal pour obtenir justice. Il ne reçut pas de réponse et ce silence lui parut un outrage.

« Dans son audience solennelle du 27 avril 1827, le consul s’étant présenté devant lui, il l’interpella avec vivacité. L’autre, qui s’exprimait bien en langue turque, répondit sur le même ton. Le dey, furieux, le frappa de son éventail et le chassa de sa présence. Un consul plus prudent et plus digne n’aurait pas provoqué une pareille scène ; mais Deval représentait la France. Il fallait une réparation. »


La scène du coup d’éventail n’a pas toujours été racontée de la sorte.

Galibert écrit :


« D’après le Maure Sidi Hamdan, la réponse de M. Deval fut on ne peut plus insultante. « Mon gouvernement, aurait-il dit, ne daigne pas répondre à un homme comme vous. » Ces paroles, prononcées en présence de toute sa cour, froissèrent tellement l’amour-propre d’Hussein qu’il ne put maîtriser un mouvement de colère et lui donna un coup d’éventail. »


Ainsi vous voyez que dans les événements fortuits apparaît une volonté, celle de Deval, le consul qui, pendant que d’autres intriguent à Paris, comme de Bourmont, brouille en Alger les cartes et est responsable du coup d’éventail autant que le dey.