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vendeur essayant avec la plus entière bonne foi de tromper l’acheteur. Phénomène éternel, universel. Mais dans celui de la colonisation algérienne les braves fonctionnaires du gouvernement général ne vendent rien à leur personnel bénéfice. Ils font un cadeau. Fichu cadeau, c’est vrai, mais cadeau. Que les hommes politiques veuillent augmenter le nombre de leurs fidèles électeurs, c’est naturel. Que les Algériens vivant de commerce veuillent que le nombre des clients s’accroisse, parfait. Mais le fonctionnaire, à moins qu’on ne l’assimile au fossoyeur classique, lequel priait le Seigneur de faire mourir quelques personnes… on ne peut expliquer son entêtement, sa rage à vouloir l’Algérie pays chaud et fertile que par la légende romaine dont nous sommes tous imprégnés. Tous, même ceux qui n’ont point fait d’humanités et n’ont qu’une très vague notion de ce qu’a pu être Rome.

Nous avons là belle occasion de noter une de ces idées directrices, qui s’acquièrent, puis deviennent normales dans une race. La rapidité avec laquelle celle-là s’est incrustée dans notre cerveau national est même remarquable. Il n’y a pas des milliers d’années, mais quelques siècles seulement que l’histoire romaine est étudiée par beaucoup de nous. Après plusieurs siècles l’idée richesse de la colonisation romaine dans l’Afrique du Nord a transformé telle case, tel pli, telle cellule de notre cerveau de telle façon qu’au choc de l’idée Algérie cette case, ce pli, cette cellule, instinctivement, automatiquement, sans réflexion, sans intervention volontaire d’opérations de critique possibles par les facultés de réaction des autres éléments de notre cerveau, répondent : richesse naturelle du pays. Le philosophe peut sur le propos de ce fait, avec des données certaines d’ob-