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tretien de presse, alors qu’il était gouverneur général de l’Algérie : « Mon programme est un programme d’eau. Je veux donner aux Algériens de l’eau, beaucoup d’eau ! — Pour les calmer ? — Non, monsieur, pour les enrichir ! »

Quels travaux que l’on fasse, il me semble, à moi profane, que l’on enrichira seulement la région déjà riche, celle qui fut de tout temps exploitée, celle qui de tout temps résista au froid et au chaud parce qu’elle n’est pas exposée aux grands courants atmosphériques sahariens, steppiens, aux longs coups de froid intense, aux longs soufflés de chaude sécheresse. Avec beaucoup de millions dépensés à fonds perdus on peut trouver, amener de l’eau qui permette de lutter contre la sécheresse et les sirocos ; passent les vents froids sur champs irrigués, c’est le givre et le gel mieux assurés. Arrosez les hauts plateaux, la région steppienne qui comprend presque toute l’Algérie ; avec les tiédeurs, avec les chaleurs des journées d’hiver et de printemps, la plante montera pleine de sève, et comme il y a autant de nuits froides que de jours chauds dans ces saisons, votre eau précieuse, payée très cher, n’aura que rendu plus certaine la mort de la pauvre plante forcée. À moins que sur chaque tige de blé, sur chaque touffe de trèfle, vous ne mettiez cloche ou paillasson. Le plus simple des paysans de mon village comprend cela. Ma concierge, qui fut quelquefois aux champs, comprend cela. Mais les grands hommes politiques comme M. Étienne, les grands économistes comme M. Chailley-Bert, les grands botanistes comme le Dr Trabut, d’Alger, les grands administrateurs comme M. de Peyerimhoff, ne comprennent pas cela. Et j’en atteste Cérès, les idiots dans cette histoire ne sont ni mes paysans, ni ma concierge, ni moi…