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dra l’heure (si même elle doit jamais venir) pour quelques-uns de l’assimilation qui leur donnera l’âme française. »


Mais M. Berthelot répondait le 27 juin 1900 :


« Il nous faut dire un mot d’une objection politique ; bien qu’elle ait à peine été formulée cette fois, parce qu’elle a retardé l’étude de la question ; c’est l’objection du séparatisme. La création d ! un budget spécial de l’Algérie ne va-t-elle pas favoriser des tendances séparatistes, l’autonomie financière apparaissant un premier pas vers l’autonomie politique et l’indépendance totale ? On s’étonne qu’un esprit aussi lucide que Burdeau ait pu s’arrêter à de semblables objections. Pendant bien longtemps encore la population indigène sera la majorité en Algérie, et la sécurité complète n’y pourra être assurée aux Franco-Algériens que par leur union avec la métropole.

« C’est la France qui assure leur défense et sur mer et sur terre ; pour qu’ils y puissent suffire ils devraient s’imposer un effort disproportionné avec leurs forces et avec leurs revenus. Alors même que dans une période évidemment encore lointaine, l’Algérie pourrait contribuer pour sa quote-part à notre budget de défense nationale, il lui faudrait, pour avoir une armée à elle et une flotte à elle, des sacrifices bien plus considérables.

« Que gagnerait-elle à s’isoler de notre empire colonial africain, dont la mise en valeur lui réserve de précieux débouchés et de larges bénéfices ?

« Sans faire intervenir aucune raison morale, le souci de ses intérêts et de sa sécurité préviendra en Algérie toute velléité de se détacher de la France. Il serait profondément injuste de suspecter le patriotisme de nos frères d’Algérie, aussi ardent que celui de toute autre terre française : comme les Bretons, comme les Méridionaux, ils ont un patriotisme local qui ne fait nul tort à l’autre, et des intérêts régionaux à faire valoir. Le respect de ces intérêts légitimes est la meilleure manière d’éviter les malentendus et les froissements.

« C’est en refusant des libertés aux colons, et non pas en les leur accordant, que l’on développe les tendances séparatistes. L’histoire des colonies anglaises et espagnoles d’Amérique l’atteste clairement.

« Nous avons abordé de front cette objection politique du séparatisme en en poussant à l’extrême l’hypothèse, mais ni votre commission du budget, ni son rapporteur n’estiment