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on parle de l’élection de M. le sénateur Gérente à ses concurrents malheureux ils disent avec une expression qui comprend beaucoup plus d’admiration que de rancune : « Ah ! oui, le bougre nous l’a bien mis. Il est vrai que sans ce cochon de Martin… » Grossièreté… mon livre est documentaire. La ruse, la sale ruse, l’ignoble ruse est admirée, en Algérie même par ceux qui en sont les victimes.

Ce bas esprit de ruse donne à l’Algérie une morale toute spéciale.

Les excès de l’antisémitisme, approuvés par le Télégramme et par la Dépêche algérienne quand M. Casteran et M. Lys du Pac ne les jugeaient que du point de vue de la morale, de la morale mise au point de la vue algérienne (Théorie de la morale-lunette si chère à la Dépêche, voir plus haut page 243 et page 241) ne furent condamnés par les Algériens que lorsqu’ils s’aperçurent que « ça leur donnait mauvaise réputation dehors ». Le crime, ils ne le réprouvent pas en tant que crime ; ils ne disent pas « nous ne devons point voler parce que voler est mauvais » ; ils disent tout simplement « ne volons plus quand on l’apprend ça nous fait du tort ». Et ils ne condamnent point les voleurs dont ils approuvent les actes. Ils condamnent les gens qui disent les vols. Ils ne deviennent pas honnêtes par vertu. Ils rentrent leurs pinces-monseigneur par intérêt. L’attitude civilisée pour eux est une attitude de ruse.

M. Casteran est sur le propos un type caractéristique. Nous avons lu comment il a célébré, sous le vocable de « superbe explosion de colère légitime, etc… », les vols, les assassinats et le reste… Lorsque M. Casteran s’aperçoit que le monde civilisé donne aux actes algériens les noms qui conviennent, il réfléchit et sa ruse écrit :