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Victor Barrucand m’a dit que parfois cette mentalité — saucisson de l’Algérien, se manifestait grandiose, magnifique. Au théâtre, une réunion. M. Lyonne, accusé d’avoir trahi, veut s’excuser. Des huées, des cris, un grognement formidable : « Au cul ! » et des milliers de bras vibrants, colères, le poing fermé, se tendent contre l’homme… du parterre, des loges, de partout ; fantastique, admirable symbole ; toute la puissance « Karageuz » de la race nouvelle : « Au cul ! » Le mot et le geste, ils l’ont naturellement à la moindre occasion, dans la rue, au café, au cercle, au bal, chez eux, ailleurs, partout. C’est la grande fraternité rêvée. L’égalité dans l’obscène et le grossier. Banquier, notable commerçant y coudoient le charretier et le marlou.

Oui, le marlou. Ne souriez point. La convenance algérienne sur le propos n’est pas la nôtre.

Et voici de 1903 :

Pour concilier à sa cause très algérienne les journalistes français du voyage présidentiel, M. Revoil avait eu l’exquise attention de les faire conduire, par la presse locale, au bordel, en fin de banquet.

Sachant le dévouement de cette fidèle et bonne presse, il lui avait imposé cette corvée. Mais il avait sans doute craint de froisser outre mesure la délicatesse de ses publicistes, en leur imposant, à eux seuls, toute la besogne, car il leur avait joint un petit jeune homme de son cabinet pour payer la dépense.

Avec quelques honnêtes gens d’Alger, — car, ne l’oublions, il y en a tout de même, et de purs Algériens, des fils de colons de la première heure ; le sang de France n’est pas tout entier pourri dans ce pays, sinon personne ne prendrait plus la peine d’en écrire ; on l’abandonnerait à sa pourriture sans plus s’en