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appel au concours des jeunes gens. Le « comité » publie qu’il « peut compter sur le dévouement de notre vaillante jeunesse » (Dépêche algérienne, 20 avril 1903). La jeunesse qui dépense vingt sous pour un masque est vaillante ; sort-elle avec ce masque, c’est du dévouement.

Le monsieur qui dit un monologue est vaillant, la pucelle qui danse est vaillante, le rimailleur qui massacre un sonnet est vaillant, le barbouilleur qui gâche une toile est vaillant, et celui qui les admire aussi. Même celui-là, vraiment… l’est, vaillant. Et… j’y pense… Comme ils s’entr’admirent, que l’Algérie est une colonie d’admiration mutuelle… c’est tous des vaillants véritables…

Dans les « lettres du Parlement » que publient les journaux, il est bien rare que les députés de l’Algérie n’aient pas « fait vaillamment leur devoir » (Nouvelles, 18 avril 1903). Et cela est tellement passé dans les mœurs, dans les habitudes de langage, que lorsque le gouverneur fait un discours, l’étiquette exige qu’il donne du vaillant à ses administrés.

« L’année 1903 a récompensé nos vaillants colons de leurs peines et de leurs labeurs. » (Délégations financières, 7 mars 1904.)

Et tout cela incruste dans l’esprit algérien l’idée que les actes les plus naturels de l’homme prennent un caractère spécial de vaillance du fait qu’ils sont accomplis en Algérie. Nos académiciens — tel M. Frédéric Masson — quand ils vont pisser et qu’on veut les photographier protestent. L’Algérien serait content, car cela donnerait un vaillant cliché.

Et si vous croyez que j’exagère, parcourez une collection de journaux algériens… C’est tout juste si dans les comptes rendus des tribunaux ils ne donnent