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Une armée que vous ne connaissez point. Et qui n’a rien de commun avec l’autre, avec celle des grognards à jurons, des traîneurs de sabre, des buveurs d’absinthe, avec celle du répertoire et de la légende. Sans doute, on voit encore, lamentables épaves d’un passé qui se cramponne, des lieutenants vieux, à nez rouge, des capitaines chauves, pansus, pour qui le fin du fin, dans le métier, c’est toujours de boire, jurer, punir et cogner.

Mais ce n’est point de ceux-là que j’ai gardé le souvenir. C’est des autres.

De ceux que notre politique engage dans une rude bataille contre le désert, dans la colonisation du Sahara. Des jeunes hommes de fière élégance ; des sobres ; des sains, à l’esprit juste, au regard pur, franc ; des laborieux ; des courageux. Recevant l’Arabe, ils lui parlent sa langue, poliment. Je les ai vus quand, après une campagne contre les voleurs de chameaux, ils revenaient de longues fatigues et d’incroyables dangers, moins éprouvés que leurs plus robustes spahis. Pour faire vivre leurs hommes dans ces pays de la soif, de la faim, de l’épouvante, je les ai vus qui creusaient des puits, qui plantaient des jardins, qui élevaient des forteresses. Je sais bien qu’il y a quelquefois des puits sans eau, des jardins sans salade et qu’aux trop violents sirocos des murs ont croulé. Mais, tout de même, il y a là de l’action. Beaucoup. De la belle et de la bonne.

Retenez ceci : de l’action non plus destructrice ; de l’action créatrice.

Un souffle, un esprit nouveau.

D’où vient-il ? D’un peu partout ; du progrès des mœurs ; de l’évolution qui renouvelle et rajeunit tout. Oui. Mais aussi d’un homme qui est aujourd’hui l’âme active de cette tentative de colonisation du Sud ora-