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coup de respect — avant de l’avoir étudié — fut littéralement affolé par les beautés du Sahara, des oasis sahariennes.

Je tiens à vous faire lire, car vous ne les liriez pas autrement, les échantillons-types de la littérature de nos grands économistes :


« Dans toutes les oasis sahariennes un arbre décore le paysage, nourrit et enrichit la population : c’est le palmier dattier, à la haute et svelte tige, aux élégants et verdoyants panaches. Les plantations de palmiers y forment de véritables forêts, en entier créées de mains d’homme. Sous leurs voûtes ondoyantes croissent les arbres les plus variés : figuiers, grenadiers, jujubiers, abricotiers, pêchers, entre lesquels serpentent en torsades gigantesques des vignes aux lourdes grappes noires… Ces forêts splendides, belles dans tous les temps, le sont surtout à l’époque des grandes chaleurs, alors qu’au loin tout est brûlé et que la vue franchissant la plaine étincelante de lumière ne rencontre à l’horizon que le flanc rougeâtre des montagnes stériles. Un air frais y circule, rapide et plein d’aromatiques émanations ; à travers les colonnades sans fin des troncs de palmiers, l’ombre, une ombre légère et douce projetée par les feuilles effilées des palmes flexibles, y invite au repos ; mille oiseaux voltigeant au milieu des rameaux touffus égaient de leurs chants le calme délicieux qui vous entoure. En créant ces jardins l’homme n’a cherché que le produit, bois ou fruit ; la nature lui venant en aide, il a rencontré la plus ravissante poésie. Si d’une oasis à l’autre le paysage est souvent sévère jusqu’à la tristesse, tous les enchantements de l’âme vous attendent à la halte, et le contraste en doublera les charmes.

« Mais ces landes elles-mêmes qui sont le cadre habituel du voyage sont loin d’être sans prestige. Longtemps discréditées sous le nom de désert, elles se peignaient à la pensée comme des plaines de sables mouvants, brûlées par des chaleurs caniculaires et peuplées de tigres et de lions ou de reptiles venimeux, images en petit du Grand Désert, tel qu’on se le figure encore… Ce pays prétendu inhabitable se trouve pour le moins aussi peuplé que les campagnes du Tell ; où nous supposons des sables stériles, le Saharien admire des steppes verdoyantes pendant une moitié de l’année ; terre de richesse