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pays, et la première idée qui s’imposa fut celle non des coups à donner, mais des coups à recevoir. Elle était désagréable. Ceux qu’on avait reçus dans la débâcle impériale cuisaient encore. On avait beaucoup plus vif le souvenir des piles subies que celui des batailles gagnées. Waterloo n’était pas encore devenu la gloire nationale que nous en avons faite depuis. Nous étions encore trop près des réalités. La guerre nous faisait peur, car nous savions ce qu’elle nous coûtait. L’idée de guerre était impopulaire partout. C’est pourquoi Charles X avait songé, en souverain prudent, à confier le soin de l’expédition contre Alger à Mehemet Ali. Pour rendre populaire cette guerre, un travail psychique très curieux se fit, qui procédait, chez les masses, des mêmes appétits de bénéfices que chez M. de Bourmont et les associés des Bacri-Deval et Cie.

Après l’idée des coups qu’on reçoit à la guerre, amenée par la connaissance de l’affaire Bacri, vint l’idée des bénéfices qu’on fait à la guerre et du butin qu’on en rapporte.

C’était, souvenez-vous-en, l’époque où se consolidaient les fortunes de la noblesse militaire impériale qui avaient échappé à la débâcle du régime napoléonien. Ces fortunes, dotations, pensions, revenus, domaines, collections, titres, tableaux, tout cela venait du butin de guerre. La nouvelle noblesse militaire impériale qui reprenait pied dans la société et faisait figure dans le monde n’était riche que parce que les fondateurs de ces maisons avaient pillé à la guerre, avaient, en suite de leurs victoires, reçu de l’argent du souverain ou pris eux-mêmes de l’argent aux vaincus. L’ancienne noblesse, principalement celle qui avait beaucoup perdu et n’avait pas encore regagné, après la première révolte contre le