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Un conseiller général de Fort-de-France, esprit fort en temps ordinaire, m’affirmait très sérieusement que parmi les victimes notables de la catastrophe se trouvaient trois personnes, haut placées d’ailleurs, qui avaient affiché leur impiété en mangeant gras le vendredi saint. Et il en concluait que leur impiété avait été punie par le Seigneur, lequel les aurait pour ce, attirées de Fort-de-France à Saint-Pierre le jour même de la catastrophe.

Les blanchisseuses de Fort-de-France affirmaient sérieusement que la ville de Saint-Pierre avait été anéantie parce que l’on y avait dansé en carême. Et l’une d’elles qu’un troupier conviait à se réjouir un vendredi, répondit que ce n’était pas « jour à bêtiser », car le Seigneur l’en punirait certainement par une nouvelle pluie de feu.

D’autres rappelaient qu’en partant pour la France à la suite de « persécutions politiques », Monseigneur de Cormont aurait jeté sa malédiction sur la ville impie et que le volcan se serait chargé de sanctionner cette malédiction…

Pline nous a conté que les gens de Pompéi entendaient, voyaient des géants infernaux dans la montagne en feu, en fumée, que dans les airs embrasés les prêtres montraient à leurs fidèles les génies vengeurs… Ça n’a pas manqué à Saint-Pierre ni à Fort-de-France.

J’ai entendu une femme dire que lors des deux éruptions elle avait vu des diables dans les nuages de fumée et que ces diables avaient reçu du Seigneur liberté de venir punir les pécheurs martiniquais. Et la pauvre hallucinée ajoutait que son confesseur lui avait dit que c’était vrai. Des gens qui se croyaient des personnages sérieux m’ont dit sans rire que les nuages de la