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moment du cataclysme. Le docteur Lherminier, qui a étudié toute cette histoire et en pense ce qu’en pensent tous les gens doués de sens critique, à savoir que c’est une supercherie, m’a dit que la vieille négresse était une folle de l’asile de Saint-Pierre. L’asile possédait, près du Litté, une succursale de campagne où l’on internait les pensionnaires les plus calmes. Dans le désarroi de l’éruption, bien que le feu n’eût pas atteint cette succursale du Litté, ceux qui l’habitaient s’enfuirent. Ainsi, la pauvre vieille se trouva libre. Dirigée par je ne sais quelle impulsion, elle revint à Saint-Pierre, s’y brûla en errant dans les ruines, où Vaillant la trouva et la ramena.

Voilà la vérité.

Et il importe de la dire, car il serait odieux de laisser se propager cette absurde légende des survivants implorant du secours et n’en recevant pas.

Des gens dévoués, des médecins, des soldats, des gendarmes, des fonctionnaires, de simples citoyens ont parcouru les ruines de Saint-Pierre aussitôt que les cendres de l’incendie en décroissance permirent d’y arriver sans qu’on mourût. La ville a été anxieusement explorée dans tous les sens, et l’on n’y a pas retrouvé trace de vivants… pas plus à la prison du miraculé Auguste que dans les rues vaguement indiquées par Vaillant pour contenir la maison de ses huit blessés.

D’ailleurs, ainsi que je le dirai souvent, tout prouve que toute vie fut instantanément supprimée dans Saint-Pierre au moment de la catastrophe. De dire qu’un être quelconque y a survécu, cela est aussi absurde que si l’on disait que les lois de la pesanteur ont été modifiées par décret ministériel.

On peut reprocher beaucoup de choses à l’Adminis-