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HERMÈS TRISMÉGISTE.


Je m’adresse, à toi, fleuve très-saint, et je t’annonce l’avenir. Des flots de sang, souillant tes ondes divines, déborderont tes rivages, le nombre des morts surpassera celui des vivants, et s’il reste quelques habitants, Égyptiens seulement par la langue, ils seront étrangers par les mœurs. Tu pleures, ô Asclèpios ! Il y aura des choses plus tristes encore. L’Égypte elle-même tombera dans l’apostasie, le pire des maux. Elle, autrefois la terre sainte, aimée des Dieux pour sa dévotion à leur culte ; elle sera la perversion des saints, l’école de l’impiété, le modèle de toutes les violences. Alors, plein du dégoût des choses, l’homme n’aura plus pour le monde ni admiration ni amour. Il se détournera de cette œuvre parfaite, la meilleure qui soit dans le présent comme dans le passé et l’avenir. Dans l’ennui et la fatigue des âmes, il n’y aura plus que dédain pour ce vaste univers, cette œuvre immuable de Dieu, cette construction glorieuse et parfaite, ensemble multiple de formes et d’images, où la volonté de Dieu, prodigue de merveilles, a tout rassemblé dans un spectacle unique, dans une synthèse harmonieuse, digne à jamais de vénération, de louange et d’amour. On préférera les ténèbres à la lumière, on trouvera la mort meilleure que la vie, personne ne regardera le ciel.

L’homme religieux passera pour un fou, l’impie