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HERMÈS TRISMÉGISTE.


ayant pris la Raison (le Verbe), et y contemplant l’ordre et la beauté[1], construisit le monde d’après ce modèle, avec des éléments tirés d’elle-même et avec des germes d’âmes. L’Intelligence, le Dieu mâle et femelle qui est la vie et la lumière, engendre par la parole une autre intelligence créatrice, le Dieu du feu et du fluide[2], qui forma à son tour sept ministres, enveloppant dans leurs cercles le monde sensible et le gouvernant par ce qu’on nomme la destinée.

La parole ou raison de Dieu s’élança bientôt des éléments inférieurs dans la pure création de la nature, et s’unit à la pensée créatrice, car elle est de la même essence[3]. Et les éléments inférieurs et sans raison furent laissés à l’état de simple matière. La pensée créatrice, unie à la raison, enveloppant les cercles et leur imprimant une rotation rapide, ramena ses créations sur elle-même et les fit tourner de leur principe à leur fin comme entre deux limites inaccessibles, car

  1. Λόγος signifie raison et parole ; ϰόσμος signifie ordre et monde. Le grec joue souvent sur ces mots à double sens, qu’une traduction ne peut rendre exactement. Il est d'ailleurs facile de reconnaître dans ce passage la théorie platonicienne de la création.
  2. Πνεῦμα, souffle ; le mot esprit ne pourrait être employé qu’avec le sens physique qu’il a dans esprit de vin, esprit de bois, esprits animaux.
  3. Le mot ὁμοούσιος, que le concile de Nicée a rendu si célèbre, est ordinairement traduit par consubsiantiel ; cependant, le mot grec qui répond exactement à substance est ὑποστάσις et non οὐσία.