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besoin de capital. Mais il est évident que j’ai besoin de capital non pour payer les salaires des ouvriers, mais pour accumuler une grande quantité de bois. Il en est de même lorsqu’on creuse un tunnel. Si les ouvriers étaient payés en tunnel (ce qui pourrait facilement se faire en les payant avec les actions de la compagnie), aucun capital ne serait nécessaire pour le paiement des salaires. C’est seulement lorsque les entrepreneurs désirent accumuler du capital sous forme de tunnel, qu’ils ont besoin de capital. Pour en revenir à notre premier exemple : le changeur auquel je vends mon argent ne peut entreprendre son genre d’affaires sans capital. Mais ce n’est pas pour me faire une avance de capital quand il reçoit mon argent et me rend de l’or, qu’il a besoin de capital. Il en a besoin parce que le genre de ses affaires demande qu’il ait sous la main une certaine somme de capital, afin que lorsque vient un chaland il puisse faire l’échange que celui-ci désire.

Et nous retrouverons ceci dans chaque branche de production. On n’a jamais besoin de mettre de côté du capital pour payer les salaires quand le produit du travail pour lequel on paie les salaires, est échangé aussitôt qu’exécuté ; cela est seulement nécessaire quand le produit est emmagasiné ou, ce qui est la même chose pour l’individu, est placé dans le courant général des échanges, sans en être immédiatement retiré, c’est-à-dire vendu à crédit. Mais le capital qui est alors nécessaire ne l’est pas pour payer les salaires, ni pour faire des avances au travail, comme on le dit toujours à propos du produit du travail. Ce n’est jamais parce qu’il fait travailler que le producteur a besoin de capital ; mais bien parce que, non seulement il occupe des ouvriers, mais parce qu’il vend ou accumule les produits du travail ou spécule dessus. C’est en général le cas pour tous les patrons.

Récapitulons : l’homme qui travaille pour lui-même reçoit son salaire dans les choses qu’il produit, telles qu’il les produit, et échange cette valeur contre une autre toutes les fois qu’il vend le produit. L’homme qui travaille pour un autre, pour un