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seau partiellement achevé prend la place de la valeur distribuée en salaires. Il n’y a nulle avance du capital dans ce paiement des salaires, car le travail des ouvriers pendant la semaine ou le mois crée ou rend au constructeur plus de capital qu’il n’en est payé à la fin de la semaine ou du mois ; c’est ce que prouve le fait que si on demandait au constructeur de vendre un vaisseau partiellement achevé, il voudrait en retirer un bénéfice.

Et c’est ainsi que lorsque l’on creuse un tunnel comme ceux de Sutro ou du St-Gothard, ou un canal comme celui de Suez, il n’y a pas d’avance du capital. Le tunnel ou le canal, une fois creusé, devient un capital équivalent à l’argent dépensé pour le percement, ou si l’on aime mieux, équivalent à la poudre, aux forets, etc., employés pour le travail, ou aux aliments et vêtements employés par les ouvriers ; comme le montre ce fait que la valeur du capital de la compagnie n’est pas diminuée, à mesure que ce capital sous formes diverses, est changé en capital sous forme de tunnel ou de canal. Au contraire il augmente le plus souvent à mesure que le travail avance, de même que le capital employé dans un mode plus rapide de production, aurait, en général, augmenté.

Ceci est également évident en agriculture. La création de la valeur n’a pas lieu tout d’un coup quand la moisson est récoltée, mais petit à petit pendant tout le temps que dure la croissance jusqu’au moment, moment compris, de la moisson ; pendant toute cette période le paiement des salaires n’affaiblit pas le capital du fermier ; ceci est tangible quand la terre est vendue ou louée pendant ce temps de croissance, un champ labouré rapportera plus qu’un qui ne l’est pas, et un champ ensemencé plus qu’un champ labouré. C’est encore tangible quand les moissons sont vendues sur pied comme cela arrive quelquefois, ou quand le fermier ne moissonne pas lui-même mais passe un contrat avec le possesseur d’instruments de moisson. C’est tangible pour les vergers et les vignobles qui, bien que n’étant