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de son travail ; que celui-ci, par une malchance quelconque, soit nul, il ne reçoit rien. Quand il travaille pour un maître il reçoit toujours son salaire parce qu’il dépend de l’accomplissement du travail et non du résultat du travail. » Cette distinction n’est évidemment pas réelle. Car en moyenne le travail fourni pour un salaire fixe produit non seulement le montant du salaire, mais plus encore : s’il en était autrement les patrons ne pourraient pas réaliser de bénéfices. Quand les salaires sont fixes, le patron prend pour lui tous les risques, et il y a compensation pour cette assurance, car les salaires fixes sont toujours un peu moindres que les salaires proportionnels. Mais, bien que, lorsque la somme fixée des salaires est stipulée, l’ouvrier qui a rempli le rôle que lui imposait le contrat, ait un recours légal contre son patron, il arrive souvent, sinon généralement, que le désastre qui empêche le patron de tirer un bénéfice du travail, l’empêche aussi de payer les salaires. Dans des industries importantes, le patron est légalement exempt en cas de désastre, bien que dans le contrat les salaires soient certains et non proportionnels. Car il est dit dans la loi de l’amirauté « la cargaison est la mère des salaires, » et bien que le matelot ait accompli sa tâche, le désastre qui empêche le navire de rapporter une cargaison le prive de ses droits à un salaire.

Dans cette maxime est enfermée la vérité que je veux démontrer. La production est toujours la mère des salaires. Sans la production les salaires ne seraient et ne pourraient pas être. C’est du produit du travail, et non d’avances du capital que viennent les salaires.

Partout où nous analyserons les faits, on trouvera que c’est vrai. Car le travail précède toujours le salaire. C’est universellement vrai des salaires reçus d’un patron par les ouvriers, comme des salaires pris directement par l’ouvrier qui est son propre patron. Dans l’un comme dans l’autre cas la récompense dépend du travail. Le paiement des salaires par le patron aux ouvriers, qu’il se fasse à la fin de la journée, ou à la fin de la