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et de séquence profondément enracinées en nous, et que nous appelons les perceptions morales. Nous avons donc assuré à nos conclusions la plus grande certitude, la sanction la plus haute possible.

Cette vérité renferme à la fois une menace et une promesse. Elle montre que les maux naissant de la distribution injuste et inégale de la richesse, qui deviennent de plus en plus apparents à mesure que se développe la civilisation moderne, ne sont pas des incidents de progrès, mais des tendances qui doivent finir par forcer le progrès de s’arrêter ; qu’ils ne se guériront pas d’eux-mêmes, mais au contraire, à moins qu’on éloigne leur cause, qu’ils deviendront de plus en plus considérables jusqu’au moment où ils nous ramèneront à la barbarie par le chemin suivi par toutes les civilisations antérieures. Mais elle montre aussi que ces maux ne sont pas imposés par les lois naturelles ; qu’ils naissent seulement de mauvais arrangements sociaux ne tenant pas compte des lois naturelles, et qu’en éloignant leur cause, nous pouvons donner une nouvelle et forte impulsion au progrès.

La pauvreté qui, au milieu de l’abondance, fait souffrir et abrutit les hommes, et tous les maux divers qui en découlent, naît de la négation de la justice. En permettant la monopolisation des richesses que la nature offre généreusement à tous, nous avons oublié la loi fondamentale de la justice, car autant que nous pouvons en juger, quand nous observons les choses dans leur ensemble, la justice semble être la loi suprême de l’univers. Mais en chassant du monde cette injustice, et en affirmant les droits de tous les hommes aux richesses naturelles, nous nous conformerons à la loi, nous ferons disparaître la grande cause de l’inégalité contraire à la nature, dans la distribution de la richesse et de la puissance ; nous abolirons la pauvreté ; nous dompterons les passions impitoyables de l’avarice ; nous tarirons les sources du vice et de la misère ; nous allumerons dans les endroits plongés dans les ténèbres de l’igno-