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de l’union, et c’est du triomphe du christianisme sur les barbares de l’Europe qu’est sortie la civilisation moderne. Si l’Église n’avait pas existé quand l’Empire romain tomba en ruines, l’Europe, privée de tout lien d’association, serait tombée dans un état à peine supérieur à celui des Indiens de l’Amérique du Nord ; on n’aurait reçu la civilisation qu’avec un caractère asiatique, par les hordes conquérantes auxquelles une religion née dans les déserts de l’Arabie avait donné la force, en unissant des tribus séparées depuis un temps immémorial, puis en débordant en entraînant dans l’association d’une foi commune une grande partie de la race humaine.

En considérant ce que nous connaissons de l’histoire du monde, nous voyons la civilisation naissant là où les hommes sont réunis en sociétés, et disparaissant partout où l’association est rompue. C’est ainsi que la civilisation romaine répandue sur l’Europe par une conquête qui assurait la paix intérieure, fut détruite par les incursions des nations du nord qui brisèrent la société en fragments sans lien ; et le progrès qui a amené notre civilisation moderne, est né lorsque le système féodal recommença à associer les hommes en plus grandes communautés, lorsque la suprématie spirituelle de Rome unit les communautés comme l’avaient fait autrefois ses légions. Quand les liens féodaux devinrent des autonomies nationales, quand le christianisme eut travaillé à améliorer les meurs, répandu les connaissances qu’il avait cachées dans les mauvais jours, resserré les liens d’une union pacifique dans son organisation pénétrant tout, et enseigné l’association avec ses ordres religieux, un progrès plus grand devint possible, et il se produisit, marchant avec une force de plus en plus grande à mesure que les hommes s’associaient plus étroitement.

Mais nous ne comprendrons jamais la marche de la civilisation et les phénomènes variés que présente son histoire si nous ne tenons pas compte de ce que je puis appeler les résistances internes, ou forces contraires, qui naissent au cœur de la so-