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généralement, de prouver l’affirmative) cela n’a aucune importance ; car la théorie courante, dans l’un et l’autre cas, est réfutée. Des civilisations sont mortes sans laisser de trace, et des progrès péniblement faits ont été pour toujours perdus pour la race ; mais, même si l’on admettait que chaque progrès a rendu possible un nouveau progrès, et que chaque civilisation a passé la torche à une civilisation plus complète, la théorie qui fait avancer la civilisation par des changements opérés dans la nature de l’homme, n’expliquerait encore pas les faits ; car dans chaque cas, ce n’est pas la race instruite et modifiée héréditairement par la vieille civilisation qui en commence une nouvelle, mais bien une race fraîche sortant d’un niveau inférieur. Ce sont les barbares d’une époque qui sont les hommes civilisés d’une autre, et ont à leur tour des barbares pour successeurs. Car toujours les hommes placés sous les influences de la civilisation après s’être d’abord améliorés, ont ensuite dégénéré. L’homme civilisé d’aujourd’hui est immensément supérieur au non civilisé ; mais il en a toujours été de même, dans les époques de vigueur, pour l’homme civilisé des civilisations mortes. Les vices, les corruptions, l’énervement des civilisations, se sont toujours montrés, passé un certain point de progrès. Chaque, civilisation balayée par les barbares a péri en réalité, de sa décadence intérieure.

Ce fait universel, du moment qu’il est reconnu, détruit la théorie du progrès par transmission héréditaire. En regardant l’histoire du monde on voit que la ligne du plus grand progrès ne coïncide nulle part, au bout d’un certain temps, avec une ligne d’hérédité. En suivant une ligne particulière d’hérédité, la rétrogression semble toujours suivre le progrès.

Devons-nous dire qu’il y a une vie nationale ou de la race, comme il y a une vie individuelle que chaque aggrégat social a une certaine somme d’énergie qui une fois dépensée est suivie nécessairement de décadence. C’est là une vieille idée très répandue jadis, qui a encore beaucoup de partisans, et que