Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/482

Cette page n’a pas encore été corrigée

canaux navigables ; des écoles rivales de philosophie, et des idées religieuses en opposition les unes avec les autres. Une grande religion, ressemblant sous beaucoup de rapports au christianisme, est née dans l’Inde, a remplacé la vieille religion, a passé en Chine, débordant sur ce pays, puis a été remplacée à son tour dans son berceau, comme l’a été le christianisme. Il y avait donc là de la vie, et une vie active, et des innovations qui en engendraient d’autres, longtemps après que les hommes eussent appris à vivre ensemble. De plus, l’Inde et la Chine ont toutes les deux reçu l’infusion d’une vie nouvelle par des races conquérantes ayant des mœurs et des modes de pensée différents.

La civilisation la plus immobile que nous connaissions est celle de l’Égypte, où l’art lui-même avait fini par prendre une forme conventionnelle et inflexible. Mais nous savons qu’avant cette période d’immobilité il a dû y avoir une période d’activité et de vigueur, une civilisation fraîchement développée, et s’étendant, car autrement les arts et les sciences n’auraient jamais pu atteindre l’élévation où ils étaient arrivés. Et des fouilles re centes ont ramené à la lumière, outre l’Égypte que nous con naissions, une Égypte nouvelle, plus ancienne encore, avec des statues et des sculptures qui, au lieu du type rigide et consacré, rayonnent de vie et d’expression et qui, en montrant un art vivant, ardent, naturel, libre, sont les indices sûrs d’une vie active et progressive. Il doit en avoir été de même de toutes les civilisations aujourd’hui stationnaires.

Mais ce n’est pas seulement ces civilisations pétrifiées que n’explique pas la théorie courante du progrès. Non seulement les hommes se sont avancés jusqu’à un point donné dans la voie du progrès, puis se sont arrêtés ; mais les hommes ont été bien loin dans cette voie du progrès, puis ils ont retourné en arrière. Ce n’est pas seulement un cas isolé qui contredit ainsi la théorie, c’est la règle universelle. Chaque civilisation qu’a vu naître ce monde a eu sa période de croissance vigoureuse, puis sa