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avec un enfant des rues, et croyez-vous que le sang d’une centaine de comtes vous donnera une femme raffinée et cultivée ?

Éloigner le besoin et la crainte du besoin, donner à toutes les classes des loisirs, du bien-être, de l’indépendance, les convenances et les raffinements de la vie, les occasions de développement mental et moral, ce serait comme introduire l’eau dans le désert. L’étendue stérile se revêtirait de verdure, et les lieux désolés d’où la vie semblait bannie seraient bientôt couverts de l’ombre des arbres et animés du chant des oiseaux. Des talents aujourd’hui cachés, des vertus inconnues se révèleraient et rendraient la vie plus riche, plus complète, plus heureuse et plus noble. Car parmi tous les hommes qui gaspillent leurs forces dans la lutte pour devenir riches, parmi tous ceux qui, dans les fabriques, sont de vraies machines, ou qui, par nécessité, doivent bêcher ou labourer ; parmi ces enfants qui croissent dans la saleté, le vice et l’ignorance, il y a des facultés de premier ordre, des talents splendides. Ils n’ont besoin que de l’occasion pour se manifester.

Considérez ce que deviendrait une société où tous auraient cette occasion. Que l’imagination peigne la scène, qui serait trop brillante pour être décrite avec des mots. Considérez l’élévation morale, l’activité intellectuelle, la vie sociale. Considérez comment, par un millier d’actions et de réactions, les membres de chaque communauté sont liés les uns aux autres, et combien, dans l’état actuel des choses, les quelques fortunés qui sont au sommet de la pyramide sociale doivent souffrir, quand même ils ne le savent pas, de la misère, de l’ignorance, de la dégradation qui sont au-dessous d’eux. Considérez toutes ces choses, et dites-moi alors si le changement que je propose ne profite rait pas à tous, même au plus grand des propriétaires ? Ne serait-il pas plus tranquille sur l’avenir de ses enfants, en les laissant sans un sou dans un tel état de société, qu’en leur laissant la plus grande fortune dans la société où nous sommes ? Si un tel état de société existait en quelque lieu ; n’achèterait-il