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l’homme qui couvre de moissons des champs dénudés ; nous mettons une amende sur celui qui monte une machine, et sur celui qui dessèche un marais. Ceux qui ont essayé de suivre notre système d’imposition à travers toutes ses ramifications, comprennent seuls combien ces impôts pèsent lourdement sur la production, car, comme je l’ai déjà dit, la part la plus lourde de ces impôts est celle qui a pour effet la hausse des prix. Il est évident que par leur nature ces taxes sont parentes de la taxe du pacha égyptien sur les dattiers. Si elles n’ont pas pour résultat de faire couper les arbres, du moins elles découragent la plantation.

Abolir ces taxes ce serait enlever le poids énorme qui pèse sur l’industrie productive. L’aiguille de la couturière comme la grande manufacture ; le cheval de voiture comme la locomotive ; le bâteau pêcheur comme le bateau à vapeur ; la charrue du fermier et le stock du marchand, seraient également libres d’impôt. Tous seraient libres de fabriquer ou d’économiser, d’acheter ou de vendre, sans être obligés de payer des amendes, et sans être ennuyés par les receveurs de l’impôt. Au lieu de dire au producteur, comme on le fait maintenant, « plus vous ajoutez à la richesse générale plus vous serez imposé ! » l’État dirait au producteur, « soyez aussi travailleur, aussi économe, aussi entreprenant que vous le voulez, vous aurez votre pleine récompense ! On ne vous mettra pas à l’amende si vous faites pousser deux brins d’herbe là où il n’en poussait qu’un auparavant ; vous ne serez pas taxé pour avoir ajouté à la richesse générale. »

Et la communauté ne gagnera-t-elle pas en refusant ainsi de tuer la poule aux œufs d’or ; en s’abstenant de museler le bœuf qui fait pousser le blé ; en laissant au travail, à l’économie, à l’adresse, leur récompense naturelle et intacte ? Car il y a aussi pour la communauté une récompense naturelle. La loi de la société est chacun pour tous, aussi bien que tous pour chacun. Personne ne peut garder pour soi le bien qu’on fait,